Savez-vous planter des choux ?

Il y a quelques années, avec un couple d’amis et leurs enfants, nous avons eu envie de créer un potager commun.

Ils avaient de leur côté un carré de terre dans leur jardin, et nous avions du nôtre la possibilité de cultiver environ 200 m2 dans le jardin des grands-parents avant que la maison ne soit vendue.

Cette expérience d’une saison nous a permis de voir que s’occuper d’un potager demandait un peu de temps et de méthode, mais nous a surtout donné envie de renouveler l’expérience.

Puis, l’AMAP d’Ancenis s’est créée, et nous avons découvert les légumes d’Irène et David : de beaux et bons légumes dont nous connaissions la provenance. Du coup, l’idée d’un potager maison a été mise de côté.

Pour être tout à fait honnêtes, au départ, les légumes d’Irène et David n’étaient pour nous que des légumes bio comme les autres, même si nous avions en plus de l’assurance du bio, le plaisir de savoir que nous contribuions à une économie locale.

Mais ça, c’était avant… Avant que nous décidions d’aller passer quelques jours chez eux…

En juin, première rencontre autour d’une table, nous posons sommairement les bases de ces quelques jours :

  • Nous serons 9 (4 adultes et 5 enfants de 10 à 16 ans).
  • Notre souhait est d’apprendre quelques bases sur la culture des légumes, et surtout de comprendre comment, eux, travaillent.
  • Nous sommes conscients que les enfants auront du mal à passer une journée complète dans les champs ou sous les tunnels.
  • Nous poserons nos petites tentes dans leur jardin et seront autonomes côté repas.

Irène et David n’ont pour le moment jamais reçu d’AMAPiens, mais sont partants pour tenter l’expérience.

Rendez-vous est donc pris pour la fin août.

Premier jour : la découverte…

Je ne m’étendrai pas dans ce billet sur le trajet à vélo avec les enfants, ni sur l’installation des tentes et la préparation des repas. Je dirais seulement que mis à part la chaleur (entre 28 et 37° ces jours là) tout s’est très bien passé.

Dès le premier jour, nous partons pour un grand tour des terrains mais, avant de partir, nous explorons le tunnel où Irène prépare amoureusement ses plants et semis.

le tunnel réservé aux semis et aux plants

le tunnel réservé aux semis et aux plants

Pour le moment, Irène et David achètent les semences pour réaliser leurs plants, et quelques plants déjà prêts en complément. D’ici peu, ils aimeraient commencer à préparer leurs propres graines. La maman d’Irène bouture régulièrement ce qui lui tombe sous la main : du coup, Irène a dans le tunnel plusieurs plants de figuiers, brugnoniers, et géraniums.

Dans l’après-midi, nous allons planter quelques centaines de choux chinois (600) et du fenouil (1300). Nous chargeons les plants dans la benne du tracteur et partons à pied vers les champs.

Chargement des plants…

Chargement des plants…

Sur le chemin, Irène et David nous expliquent leur souhait de travailler au plus près du cycle de la nature, d’observer et de reproduire. Parmi leurs sources d’inspirations : des livres sur la permaculture, la biodynamie, l’agroécologie… Il y a quelques mois, ils ont également été suivre une formation à la ferme des Amanins.

Chez Irène et David, aucun dogmatisme, aucune chapelle sacrée : ils testent. Si ça fonctionne, ils reproduisent, si ça ne fonctionne pas, ils passent à autre chose (et ré-essayeront peut-être une prochaine fois…). Entre l’envie d’essayer (avec le risque de se tromper) et le besoin d’assurer au moins 90 paniers hebdomadaires, il faut trouver un juste équilibre.

Une des règles qu’ils essayent de suivre au plus près : le non travail du sol.
Leur exemple : la forêt. Le système de production de biomasse le plus efficace et, dans une forêt, le sol n’est jamais travaillé, jamais mis à nu.

Visite d'un tunnel

Visite d’un tunnel

Rapidement, nous avons quelques questions sur la présence des bâches plastiques et des toiles tissées : oui, c’est l’une des concessions actuelles pour faciliter le travail. Idéalement, ces bâches pourraient être remplacées par des feuilles ou de la paille. Ces toiles et ces bâches sont réutilisées au maximum et, mine de rien, si l’on compare l’impact de ce pétrole stocké sous forme plastique à celui qui était utilisé auparavant pour retourner la terre et désherber, cette technique est bien plus sobre.

A moyen terme, le souhait d’Irène et David est de planter de nombreuses haies fruitières et diversifiées afin, notamment, de pouvoir profiter :

  • de la régulation thermique qu’elles apportent,
  • des abris à insectes qu’elles constituent,
  • de leur feuilles pour le paillage,
  • de la nourriture qu’elles apportent au sol.

Après cette première visite, nous voici accroupis, assis ou à genoux pour planter choux et fenouil.

Il y a quelques jours encore, sur ces planches de culture poussaient des courgettes, après la récolte, David a couché ce qui restait des légumes, arrosé, puis recouvert d’une toile tissée.

Savez-vous plantez les choux…

Savez-vous planter les choux…

une fois plantés… il faut bien arroser !

Une fois plantés… il faut bien arroser !

Puis couvrir d'un voile de mariée… En 2 heures, nous avons planté 600 plants de choux de Chine et 1300 plants de fenouil.

Puis couvrir d’un voile de mariée… En 2 heures, nous avons planté 600 plants de choux de Chine et 1300 plants de fenouil.

Une petite photo prise 15 jours plus tard…

Une petite photo prise 15 jours plus tard…

2e jour… : c’est la patate !

Au programme de cette deuxième journée : récolte de pommes de terre et désherbage des carottes.

Les pommes de terre et les poireaux sont encore cultivés sur des sols un peu travaillés où le tracteur est encore nécessaire, mais cela pourrait bien changer dans les années à venir…

La terre est sèche, mais cela ne l’empêche pas d’abriter beaucoup de vie. Irène nous invite à nous pencher sur ces morceaux de terre, à regarder les chemins que tracent insectes et vers de terre.

Dans ce champ, 5000 M2 de de pommes de terre. David est passé un peu plus tôt ce matin avec le tracteur pour sortir les pieds. A nous de ramasser et de mettre les tubercules en cagettes.

Au bout de 2 heures, nous avons récolté plus de 500 kg de patates ! Autant vous dire que nous avions la pêche.

Tout le monde s'active pour le ramassage des pommes de terre !

Tout le monde s’active pour le ramassage des pommes de terre !

Sur le chemin du retour, nous passons par un champ où les herbes ont été couchées. Le projet est de pouvoir planter directement dans ce type de paillage/engrais vert.

Nous passons ensuite à côté d’un drôle d’outil réalisé par David…

Irène nous explique par ailleurs combien le passage au non travail du sol a changé leur vie depuis 4 ans. Le tracteur est beaucoup moins utilisé. Ils ont laissé tomber des outils tels que le désherbage thermique, régulièrement utilisé en agriculture bio, mais gros consommateur de carburant (il faut faire bouillir des centaines de litres d’eau dans une chaudière alimentée au fioul).

Dans le courant de l’après-midi, une fois la chaleur un peu retombée, nous nous sommes retrouvés dans le tunnel des carottes pour le désherbage.

Irène en plein désherbage !

Irène en plein désherbage !

Le désherbage se fait à l’aide d’un petit outil (une serpette japonaise) qui nous permet de couper les plantes au plus près de la racine. Laisser les racines dans le sol préserve la structure de ce dernier, les racines se décomposeront d’elles-mêmes, nourrissant alors le sol et l’aérant par les fines galeries qu’elles laissent en se décomposant. Les herbes coupées sont placées en paillage autour des carottes ou laissées dans le passe-pieds.

Ces 2 heures de désherbage passent à toute vitesse avec entre autres réjouissances : discussions sur la nature des herbes coupées, étude de la vie du sol (avec observation de champignons à la loupe…) et découverte d’une momie dorée de puceron suite à un parasitage d’aphidius, un auxiliaire de culture, de la famille des hyménoptères, bien utile pour lutter contre les invasions de pucerons.

En mode observation…

En mode observation…

Pour un observateur de passage, cette séance de désherbage pouvait ressembler à une passionnante conférence potagère ! (Non, non, nous étions en plein travail !)

Preuve du travail : les rangs désherbés !

Preuve du travail : les rangs désherbés !

3e jour… : A point la pastèque !

Au programme de la matinée : récolte de basilic.

Ici, le basilic pousse sur le côté d’un tunnel occupé par des oignons. Du coup, pendant que certains préparent les bouquets de basilic (qui seront mis dans le panier des AMAPiens en fin de journée), les autres désherbent les rangs d’oignons.

Le liseron semble bien se plaire dans ce tunnel… C’est d’ailleurs faisant ce même constat il y a 2 ans qu’Irène et David ont eu l’idée de planter dans le tunnel voisin des patates douces : liseron et patates douces sont de la même espèce (il suffit de voir les fleurs pour s’en convaincre). Les patates douces se sont effectivement bien acclimatées et le liseron a déclaré forfait.

Au retour de la récolte du basilic, David nous propose de goûter une pastèque tout juste récoltée…

L'homme à la pastèque d'or…

L’homme à la pastèque d’or…

Joie des petits comme des grands ! Et, comme nous sommes aussi curieux que gourmands, une deuxième pastèque est ouverte : cette pastèque « premier rayon de lune » a une chair jaune et sucrée très différente de la première.

Pour terminer cette journée – avant de prendre le chemin du retour – nous retournons désherber. En moins d’une heure, l’équipe que nous formons a joyeusement désherbé 3 rangs d’haricots et 3 rangs de patates douces.

Un champ de patates douces

Un champ de patates douces

Sur le chemin du retour, nous passons voir les ruches hébergées sur le terrain. Pas de frelons en vue, tout va bien !

Les ruches…

Les ruches…

Nous terminons notre séjour heureux de ces trois jours de partage, de découverte et de riches discussions.

En écoutant Nathalie et Robin parler de leurs séjours régulier dans des fermes (via l’accueil paysan) Irène et David se disent qu’il pourraient peut-être aménager un lieu d’accueil régulier.

Une chose est sûre : après ces 3 jours, nous ne dégusterons plus les légumes de l’AMAP de la même manière. Derrière chaque tomates, chaque céleri, chaque carotte ou haricot, nous mesurons maintenant pleinement l’attention qui est portée et les soins donnés au sol qui les porte.

En une phrase, ce que chacun retient de ces trois jours :

Nathalie : « Malgré la chaleur écrasante, les temps de travail ont toujours été rendus agréables par Irène et David qui nous racontaient de belles histoires sur la terre et la magie de la biodiversité ! C’est le moment le plus ressourçant de mes vacances été 2016, quel bonheur, quelle évidence ! »

Gabrielle : « Merci beaucoup Irene Enora Félix et David pour cet accueil chaleureux et ces trois jours dans la nature. »

Ernestine : « C’était rigolo d’apprendre à planter les choux et le fenouil… en allant se rafraîchir sous les jets d’eau quand on avait trop chaud »

Emmanuelle : « 3 jours rythmés par les échanges, les découvertes autour du sol et de ce qui le nourrit, l’apprentissage de techniques et la compréhension du métier que font chaque jour Irène et David, c’était riche ! Cette passion autour des légumes que nous mangeons, ça donne encore plus envie de bien les cuisiner, et ça donne aussi envie de revenir leur donner un coup de main ! »

Albert : « Irène et David ne ménagent pas leurs efforts – et quand on est passionné, on ne compte pas – mais ils sont continuellement à la recherche de la solution la plus simple, la plus directement inspirée par l’observation de la nature autour d’eux. »

Marie : « C’était très intéressant d’apprendre toutes ces choses autour de la nature et de son fonctionnement, de voir comment on peut retranscrire ça pour cultiver la terre et faire pousser des légumes. Je suis très contente d’être venue et je reviendrai avec plaisir ! »

Noé : « Apprendre à repérer les bonnes mauvaises herbes et les couper, ramaser les pommes de terres, planter les choux chinois et les fenouils, tout ça était bien marrant et j’ai appris pas mal de choses. Merci de nous avoir accueilli ! »

Sarah : « C’était super ces 3 jours ensoleillés avec vous, on a appris plein de choses sur les petites bêtes de la nature et les légumes ! Merci pour ce séjour. »

 

Quelques chiffres :

Terres en bio : depuis 1986 (par les parents d’Irène)
Date d’installation :
David en 1996 (Irène le rejoint en 2001)
Première AMAP : 2006 (Nantes)
Deuxième AMAP : 2008 (Ancenis)
Passage au non travail du sol : 2012

4,5 hectares cultivés en plein champs, et 5500 m2 en tunnels
Une quarantaine d’espèces de légumes et de multiples variétés par espèces.
90 paniers hebdomadaires sur 2 AMAP (1 à Nantes, et 1 à Ancenis)
2 marchés (stands avec le GAEC de volailles) + vente directe au Wagon
3,5 personnes à temps plein

Approvisionnement en eau : un étang sur le terrain, creusé il y a 48 ans par les parents d’Irène.

Labellisation AB (mais vont bien au-delà du cahier des charges)
Produits phytosanitaires utilisés de temps à autre :
– Engrais foliaire à base de végétaux (orties, prèles, consoudes)
– Feramol (contre les limaces en début de culture)
ce produit est autorisé en agriculture AB.

Les auxiliaires de cultures sont attirés par les fleurs plantées à proximité des cultures. (Irène et David ont l’un et l’autre une formation initiale en horticulture)

1 tracteur (65 CV – fin des années 70)
la consommation de fioul a été divisée au moins par 2 depuis le passage au non travail du sol.

Exemple d’un cycle de culture :

  1. Préparation du sol : les buttes sont déjà formées, le sol est arrosé puis une bâche noire est posée lorsque l’herbe remonte et le sol reste couvert pendant quelques semaines.
  2. Plantation : la bâche noire est remplacée par une toile tissée, trouée selon les espaces souhaités pour la plantation.
  3. Pendant la pousse : le désherbage est réalisé en coupant les pousses mais en laissant les racine dans la terre. Les plantes coupées sont remises dans le passe-pieds ou au pied des cultures.
  4. Après récolte : la bâche tissée est retirée, ce qui reste du légume cultivé est couché au sol ou mis dans le passe-pieds.

Le principe de base est de ne jamais laisser le sol à nu et l’idéal est de planter directement dans ce qui reste des cultures précédentes ou dans un engrais vert.

Leurs plus grandes fiertés :

  • amélioration du sol, et de leur qualité de vie.
  • voir réapparaître des plantes et des insectes et des oiseaux qui fuyaient les champs.
  • moins dépendre du pétrole.
  • partager leur passion.

Des points qu’ils aimeraient rapidement améliorer :

  • planter des légumes dans du couvert végétal vivant (trèfle blanc…)
  • introduire des haies dans le jardin

Des projets qui prendront un peu de temps :

  • création de cabanes pour accueillir des personnes de passage et favoriser l’échange.
  • que la ferme devienne un lieu pédagogique.

Une phrase qui les accompagne :
« Plus le paysan fait vivre son sol, plus le sol fait vivre le paysan »

 

Extrait de la revue "Les 4 saisons du jardin bio" aux éditions Terre Vivante

Extrait de la revue « Les 4 saisons du jardin bio » aux éditions Terre Vivante

Un résultat (presque) connu d’avance…

ref

J’aurais aimé ne pas publier ce billet de blog.

Les résultats officiels ne vont pas tarder à tomber :  environ 56 % des personnes consultées en Loire Atlantique ont voté OUI pour le projet d’aéroport à Notre Dame des Landes.

J’aurais préféré que les habitants de ce département soient plus sensibles aux arguments développés par les écologistes depuis de nombreuses années.

D’un autre côté, je ne suis pas étonné.

Si ce gouvernement a choisi de circonscrire la consultation au seul département de la Loire Atlantique (alors même que la notion de département est en train de disparaître), c’est uniquement parce que les arguments économiques (à court terme) et nuisances actuellement endurées par les riverains nantais permettaient un vote en faveur du « oui ».

En quoi un habitant de d’Ille et Vilaine ou de Vendée serait moins concerné ? Et pourquoi ne pas avoir consulté l’ensemble des français ?

Bref… cette consultation nous permet de voir qu’il reste beaucoup, beaucoup à faire pour expliquer à des personnes que l’équation économique du XXIe siècle ne passera pas par la multiplication des projets détruisant les écosystèmes.

Au contraire. Comme l’explique Isabelle Delannoy (co-auteure du film Home), l’économie à venir sera symbiotique : une économie qui saura prendre en compte l’ensemble des interactions et des synergies disponibles. Une économie inclusive et non-exclusive. Une économie à échelle humaine et régénérative.

Alors oui, je suis déçu et attristé par ce résultat, mais d’un autre côté, si cela peut nous permettre à nous, acteurs conscients des solutions pérennes, d’apprendre à mieux communiquer, alors tout n’est pas perdu.

Plus que jamais, nous devons nous rapprocher des personnes qui souffrent du système économique actuel pour montrer que d’autres voies existent et fonctionnent.

Plus que jamais, nous devons aller à la rencontre et débattre avec les acteurs économiques implantés et leur expliquer qu’il existe des modèles performants bien plus adaptés aux crises sociales et environnementales auxquelles nous sommes confrontés.

Demain commence aujourd’hui.

Edit :
23:35 – les résultat complets sont maintenant connus.
Je dois avouer que je ne m’attendais pas à un vote aussi serré côté Nantais. Ayant vécu 3 ans sur Nantes, j’ai connu ces avions qui passent au dessus de la ville. Je comprends totalement le point de vue de Nantais qui souhaitent voir leur aéroport réduire ou disparaître #NotInMyBackYard disent nos copains américains.
Par contre, j’ai vraiment du mal à comprendre pourquoi des communes du nord-est du département ont voté aussi massivement pour le « oui » (plus de 80% à Ruffigné, Lusanger et Noyal-sur-Brutz).

 

 

Oui ou non : la vie est-elle si binaire ?

europe-map

Je me rappelle en 1979 la première élection du Parlement Européen au suffrage universel direct.
Je me rappelle la chute du mur de Berlin en 1989, puis le traité de Maastricht en 1992.

Je me rappelle cette envie, cet espoir d’une Europe unie, pacifiée, où les biens et les personnes peuvent circuler librement.

Et puis, petit à petit voir que l’Europe qui se construit n’est pas celle qui me faisait rêver. Il n’y a pas une Europe mais des Europe :
une Europe économique qui se construit à vitesse grand V, facilitant l’accès aux multinationales et à l’écoute des lobbies.
une Europe fiscale qui ne ressemble à rien,
une Europe sociale qui n’avance pas,
et surtout une Europe des peuples totalement ignorée.
Bref, politiquement, l’Europe me semble un mythe.

Nous avions vécu le mini-séisme du « Non » au projet de constitution européenne en 2005, hier nous avons vécu le « Non » des Anglais.

Compliqué de faire le tri dans les « non » :

Certains disent « non » pour dire :
 »Nous sommes profondément européens et ne voulons pas de l’EU telle que vous nous la proposez aujourd’hui : une Europe des lobbies et des technocrates »

et d’autres pour dire :
 »Nous sommes nationalistes, et comptons bien le rester« .

Toujours très périlleux de réduire à « oui » et « non » tant de complexité. Du coup, sans dialogue ou compromis possible, nous arrivons à des extrémités.

Par leur « Non », nos amis Anglais n’ont pas choisi la facilité mais nous pouvons aussi souhaiter que cela permette à l’EU de se questionner… mais vite, car les nationalistes de tout bord se sentent pousser des ailes.

Je vous souhaite un très bon we malgré tout, la vie ne se résume pas à l’Europe… demain, ça sera à notre tour de choisir entre « oui » et « non » concernant l’implantation de l’aéroport à Notre Dame des Landes.

 

C’est quand la mort ?

Un petit texte présent dans mes tiroirs depuis quelques années.
Dialogue entre une fille et son père.

Je me rappelle, j’avais tout juste 9 ans. C’était le printemps, mais il faisait déjà très chaud et on se croyait presque en été. Papa dessinait dans son atelier et moi, j’avais une question sur le cœur.

– Dis Papa, c’est quand la mort ?

Relevant le nez de ses dessins, on aurait dit que mon papa cherchait ses mots.

– … la mort c’est lorsque le corps ne répond plus du tout. Quand il n’y a plus de respiration, que le cerveau cesse de fonctionner et que…

– Mais non ! je ne te demande pas « c’est quoi la mort ? » mais quand est-ce qu’elle arrive ?

A ce moment là, mon papa a vraiment posé ses crayons et m’a regardée comme les jours où je m’habille en jupe, tee-shirt et sandales alors qu’il pleut et qu’il fait froid.

– Hum… pourquoi poses-tu cette question-là ?

– Je ne sais pas, comme ça…

– Il y a quelque chose qui te tracasse ?

– Pas vraiment, mais un peu quand même. Tu sais, il y a longtemps quand grand-mère est morte, tu m’avais expliqué qu’elle était vieille, que c’était normal qu’elle meure parce que son cœur était très malade. Mais l’autre jour, Justine m’a dit que sa cousine Manon venait de mourir alors qu’elle n’avait même pas 15 ans. C’est grand 15 ans, mais ce n’est pas vieux. Je trouve ça bizarre de mourir quand on n’est pas vieux.

– Oui, je comprends mieux ta question maintenant. Tu sais, on dit souvent que l’une des différences entre les humains et les autres animaux, c’est que nous savons qu’un jour, nous allons mourir.

– Ah  ? Le chat il ne sait pas qu’il va mourir ?

– Je ne sais pas si le chat sait s’il va mourir ou pas. En tout cas, s’il se pose la question, il ne le montre pas beaucoup. Les humains, depuis toujours montrent qu’ils se posent des questions sur la mort. Très loin dans l’histoire on retrouve la trace de tombes et de cérémonies autour des morts. Les humains savent qu’un jour ils vont mourir. Mais personne ne sait quand ce moment arrivera pour lui.

– Tu veux dire que je peux mourir demain ?

– Nous allons tous mourir. Ce peut être demain, dans 10 ans, dans 50 ans, dans 10 secondes.

Là, c’est moi qui cherchais mes mots. Je ne savais plus quoi dire, la peur montait en moi. C’est nul ça ! Je n’ai pas envie de mourir moi ! Les idées se bousculaient dans ma tête mais les mots ne sortaient pas.

– Tu vois, là, 10 secondes se sont écoulées, et tu n’es pas morte ! Et tu sais quoi ? Il y a de très fortes chances pour que demain arrive et que tu sois toujours vivante ! Me dit Papa avec un grand sourire.

Je ne savais toujours pas quoi dire, mais si on peut mourir n’importe quand, c’est vrai qu’il n’y a pas beaucoup plus de raisons de mourir à 10 ans qu’à 70 ans.

– Mais comment je fais quand j’ai peur ? peur de mourir demain ou peur que tu ne reviennes jamais d’un voyage ?

– Déjà, tu peux remplacer la peur par la confiance. Il y a également une chose que tu peux faire avec les gens importants pour toi : c’est de ne jamais vous quitter en étant fâché. Et puis, toi qui aimes les maths, sais-tu ce qu’on appelle : « l’espérance de vie » ?

– Heu non… c’est quand on espère qu’on va vivre longtemps ?

– Ah, non, ça c’est la foi, ou un souhait si tu préfères. L’espérance de vie, c’est surtout mathématique. Tu sais, il y a des gens dont le métier est de compter. Ils comptent tout : le nombre de gens qui regardent la télé, la quantité de pluie qui est tombée, le nombre d’animaux sur la planète…

– Même les vers de terre ?

– Oh oui, je suis certain qu’ils peuvent même compter les vers de terre ou les brins d’herbes ! Dans les choses qui sont comptées, il y a le nombre d’enfants qui naissent et le nombre de personnes qui meurent. Tant qu’à faire de les compter, on note également l’âge auquel ils meurent.

– Et il y en beaucoup qui meurent jeunes ?

– En fait, ça dépend surtout de où tu vis. Là, nous sommes dans un pays où nous vivons assez longtemps : nous mangeons régulièrement, nous pouvons nous soigner lorsque nous sommes malades. En France, au début du XXIe siècle, l’espérance de vie est d’environ 77 ans pour les hommes et 85 ans pour les femmes.

– Je ne comprends pas… La cousine de Justine elle est bien morte à 15 ans, elle !

– Oui, ce sont ce que l’on appelle des moyennes. La cousine de Justine est morte à 15 ans, mais regarde, l’arrière grand-mère de Martin vient de fêter ses 103 ans ! L’espérance de vie, ça signifie, qu’en général, en tant que fille et française, tu as de grandes chances de vivre jusqu’à au moins 85 ans.

– Dis donc… c’est vieux ça 85 ans, c’est encore plus vieux que grand-mère quand elle est morte, non ?

– Oui ! tu as tout à fait raison, celle que tu appelles grand-mère, et qui était en fait ton arrière-grand-mère, est morte à 79 ans, ce qui est déjà pas mal ! Mais tu sais, le plus important dans tout ça, ce n’est pas tellement de vivre le plus longtemps possible, mais d’être heureux de la vie que l’on a et de partager ce bonheur.

– Etre heureux et partager ce bonheur ?

– Oui. Par exemple, tu as des personnes qui vivent très, très longtemps mais qui n’aiment pas grand monde, qui passent beaucoup de temps à ronchonner, et d’autres, qui malheureusement meurent jeunes, mais qui durant leur courte vie on rendu des gens heureux, que ce soit par leur vie de tous les jours ou bien en faisant des choses moins ordinaires comme écrire de la musique ou créer des inventions qui changent la vie.

– Je comprends : en fait, elles sont mortes, mais comme elles laissent un bon souvenir, c’est un peu comme si elle étaient encore vivantes.

– Exactement !

– Et bien Manon, la cousine de Justine, je crois que c’était ça. Elle était musicienne et tout le monde l’aimait beaucoup. Je suis certaine qu’elle a laissé pleins de beaux souvenirs et qu’elle va continuer à vivre longtemps dans le cœur de ceux qu’elle aimait.

C’était il y a presque 6 ans.

Demain, j’aurais 15 ans, l’âge de la cousine de Justine. Je ne la connaissais pas, mais régulièrement, je pense à elle.

Nous avons tous, une mort qui nous a marqué, une mort qui soudain nous rappelle que nous aussi, un jour, nous mourrons.

Quand je pense à ce jour, je ne suis pas triste, je n’ai pas peur. Je me dis simplement que je souhaiterais que ce moment arrive aussi tard que possible. J’ai tellement de choses à faire et d’amis à découvrir !

Nous avons pris le mur en pleine face

Photo : Kristen Bruley - CC0 1.0

Photo : Kristen Bruley – CC0 1.0

 

Depuis quelques années, nous pensons qu’il faut freiner pour éviter de se prendre le mur… en fait, le mur, nous l’avons pris, ça n’a pas fait de bruit, mais petit à petit tout s’écroule.

Aujourd’hui, ralentir ne suffit plus : Il faut changer de direction et reconstruire.
L’idée peut paraître angoissante pour certains, passionnante pour d’autres.
Tout n’est qu’une question de point de vue et de résilience.

Souvent, nous attendons LE choc pendant que d’autres attendent LE grand soir. Mais comme la grenouille qui ne sent pas l’eau se réchauffer et qui cuit à petit feu, les changements se font de façon progressive.

Du coup, ce mur que nous redoutons, ce virage qu’il faudrait prendre, ce ralentissement nécessaire se diluent dans le quotidien.

Et pourtant…

Pourtant de nombreux signaux sont au rouge vif : extinction massive des espèces, inégalités des richesses démesurée, ventes d’armes en plein essor, pollution record

Prendre conscience que nous avons déjà heurté le mur nous permet de passer d’un état semi-passif « qu’est-ce qui va se passer ensuite ? » à un état actif « réparons, reconstruisons, inventons ! »

La très bonne nouvelle est qu’il existe de nombreuses pistes pour reconstruire ! Le film Demain nous en donne quelques-unes, et si vous cherchez un peu ici ou , vous en trouverez plein d’autres !

A chacun de nous de choisir où nous souhaitons placer notre énergie.

Il se passe quelque chose…

place-bouffay-nantes-36mars

Il se passe quelque chose. Je ne sais pas où cela nous mènera mais un élan a été lancé et ce mouvement de convergence des luttes et des actions pourrait bien nous surprendre. Retour sur ma soirée du 36 mars (5 avril) à Nantes…

Le mouvement #nuitdebout s’est mis en place alors que j’étais déconnecté de mon ordinateur, de la radio et des journaux (c’est souvent le cas lorsque je suis en salon).

Du coup, le 5 avril je poste le mot suivant et quelques amis me conseillent un peu de lecture :

questions-nuitdebout

Ce que je lis ici, ou me donne envie d’en savoir plus, le soir même nous allons avec ma douce et tendre faire un petit tour à Nantes, place du Bouffay.

En arrivant, nous avons la bonne surprise d’y retrouver de chers amis : dommage de ne pas avoir pris le temps d’en discuter avant, nous aurions covoituré !

Nous constatons de suite une ambiance à la fois festive mais également très studieuse : il y a plusieurs cercles de parole et tout autour des personnes vont et viennent. Cette organisation n’est pas sans rappeler les forums ouverts (que les Colibris ont contribué à populariser en France entre 2009 et 2011). Au dessus de nous, un hélicoptère tourne autour de la place.

twitt-nuitdebout

Les personnes présentes sont plutôt jeunes (20-25 ans) mais nous sommes quelques quadra et quinqua à faire nos curieux, à participer à quelques discussions.

Je m’assois pour participer à une discussion sur le travail – c’est le paradoxe : tout le monde parle de #nuitdebout mais dans la réalité c’est plutôt #soirassisenrond – une grande feuille au centre du cercle, deux personnes qui prennent des notes, une personne qui distribue la parole : les échanges vont bon train et petit à petit la feuille du centre se remplit d’idées et de propositions.

Tout à coup, des cris, on perçoit de la tension dans l’air et tout va soudainement très vite : chacun se lève, nous reculons et comprenons que les CRS chargent sur la place.

Incompréhension autour de moi. J’hésite à quitter la place, on aperçoit des fumigènes et je vois des personnes qui reviennent vers nous en disant « j’ai été gazé ».

La tension est palpable, mon coeur s’est légèrement emballé et je me sens mal à l’aise dans cette ambiance qui tranche avec celle de dialogue et de calme présente quelques minutes plus tôt.

Pourquoi chercher à vider la place ? Pourquoi créer de la tension ? Comment réagir face à cette violence ?

A notre surprise, le calme revient doucement et au bout d’une dizaine de minutes quelques cercles se reposent sur la place, mais il y eu cassure, il faut recréer l’ambiance, rappeler pourquoi nous sommes là. Un rapide coup d’œil périphérique me permet de constater qu’environ un tiers des participants ne sont plus là. Mine de rien, la peur d’une évacuation totale de la place reste présente.

twitt-nuitdebout2

Et puis les discussions reprennent, l’ensemble des commissions se remettent au travail et les CRS disparaissent de notre vue.

Certains disent qu’ils n’étaient là que pour dégager la voie de tram, d’autres que c’était une manière de dire à d’éventuels casseurs « on vous surveille » et nous sommes plusieurs à penser que derrière cette charge se trouvent ceux qui préfèreraient qu’un tel mouvement spontané et non cadré ne prenne pas trop d’ampleur.

twitt-nuitdebout4

Alors que tombe la nuit, l’ambiance change sur la place : l’alcool et les roulées qui font rigoler font leur effet.

Mais j’ai l’impression que celles et ceux qui participent à l’AG et aux commissions en cours veillent à rester sobre.

C’est un peu comme s’il co-existait deux mondes sur cette place, deux mondes qui pourraient symboliser nos propres incohérences.

La beauté est de constater que ces deux mondes peuvent vivre ensemble : ceux qui n’étaient ce soir pas d’humeur à refaire le monde, n’empêchent pas non plus la discussion.

Et si c’était ça l’avenir : réussir à co-exister en nous réjouissant de nos différences ?

nuitdebout-nantes-36mars-feu

 

Pour continuer à suivre le mouvement #nuitdebout à Nantes :
#Nuitdebouffay et @NuitDebout44

Dans les medias  : Ouest-FranceFrance Info

Lorsque les enfants nous invitent à prendre soin de la ville

carte-ancenisCe matin, à l’initiative des enfants du Conseil Municipal des Enfants, nous nous sommes retrouvés une cinquantaine d’habitants de la ville d’Ancenis (adultes et enfants) pour ramasser les déchets traînant dans les rues du centre ville.

Cette idée est notamment née du constat fait par les enfants que papiers et mégots de cigarettes se retrouvaient régulièrement sur les trottoirs.

En 1h30 heures à 50 personnes (soit environ 75 heures), nous avons ramassé l’équivalent d’environ de 6 poubelles de 200 litres : canettes en alu, bouteilles en verre ou en plastique, emballages de toute sorte, mégots, papiers gras, lingettes… Mais également quelques déchets tels que pneu, casserole, plaque de polystyrène…

Un enfant a même eu la bonne surprise de trouver un billet de 50€ !

Les personnes croisées étaient plutôt surprises et bienveillantes (il aurait peut-être été intéressant de pouvoir leur remettre un papier pour leur expliquer la démarche), mais nous avons croisé un groupe de cyclistes amateurs (de sportifs retraités si j’en juge par l’âge) dont l’un nous a adressé un curieux compliment  : « Comme s’il n’y avait pas assez de chômeurs, il font nettoyer la ville aux enfants« .

Il est bien évident que ce ne sont pas aux enfants de nettoyer la ville. Mais pour avoir suivi la démarche (la demoiselle Sarah fait partie du CME…), je trouve intéressant que les enfants pointent ainsi des pistes d’amélioration possibles.

Les enfants ont notamment proposé :

  • plus de poubelles disposées en centre-ville,
  • des cendriers placés aux abords du lycée,
  • des moments comme celui de ce matin où les habitants prendraient du temps pour prendre soin de leur ville.

De mon côté, je trouverais intéressant que les habitants qui s’impliquent ainsi se voient crédités d’une levée ou de quelques ouvertures supplémentaires dans l’année. Une façon, non pas d’inciter, mais de remercier les habitants qui prennent un peu de temps pour le bien commun.

A côté de cela, je me pose également deux questions :

  • les services techniques de la ville sont-ils à ce jour bien dimensionnés pour assurer la propreté de la ville ?
  • que pourrions-nous imaginer pour sensibiliser les touristes et les habitants à mieux déposer les déchets là où il doivent l’être ?

Si vous avez des idées, n’hésitez pas à poster vos commentaires, je ferai remonter !

 

 

 

 

Sommes-nous en état de voir les solutions existantes ?

SplitShire, by Daniel Nanescu

SplitShire, by Daniel Nanescu

 

De nombreuses solutions existent, mais sommes-nous en état de les saisir ?

Depuis quelques temps, autour de moi, je sens poindre en parallèle une belle espérance et une profonde fatigue, proche de l’épuisement.

De par mon métier, j’ai la chance de sillonner un peu la France, de rencontrer et d’échanger avec de nombreuses personnes qui, depuis plusieurs années, portent des projets porteurs de solutions, cohérents économiquement, respectueux des écosystèmes et humainement enrichissants.

De tels projets, vous en trouvez à foison : dans des livres tels que Ils l’ont fait et ça marche, Ils changent le monde ou chez des éditeurs tels que Rue de L’Echiquier, Yves Michel, ou dans la collection Domaine du possible chez Actes Sud, des films comme Demain, Solutions locales pour un désordre global, En quête de sens ou des sites comme On passe à l’acte ou Ecoloinfo (liste très partielle).

Côté magazines, Kaizen, We Demain, L’âge de faire, Feminin Bio, Alternatives Eco (actuellement à la recherche de financements) ou Terra Eco (actuellement à la recherche d’un partenaire) sont également – chacun dans leur registre – d’excellentes sources d’information et d’inspiration.

Jamais, dans l’histoire de l’humanité, nous n’avons eu accès à autant de savoirs, de compétences techniques et de facilités à transmettre savoir-faire et connaissances.

Il y a encore 10 ans, nous pouvions encore nous dire « Où sont les solutions ? ». Aujourd’hui, celui ou celle qui pense ça ne regarde simplement pas au bon endroit.

Aujourd’hui, la question devient : « Pourquoi ces solutions ne sont-elles pas adoptées plus largement ? »

Dans un récent billet, Cyrille de Lasterie commence par : « J’ai atteint un tel niveau d’exaspération politique que j’ai l’impression d’être au bord du burn out »

Cette impression, il m’arrive de la partager, et surtout, je la croise de plus en plus souvent lors de mes rencontres avec d’autres porteurs de projets.

Alors oui, je connais bien la définition de la crise donnée dans les années 1930 par Antonio Gramsci, mais, n’en déplaise à certains, l’histoire ne se répète pas et j’aime à croire qu’il est possible d’éviter le pire.

Le pire serait sans doute de nous endormir, d’oublier de nous réveiller lorsque celles et ceux qui ont le plus à perdre d’un changement de paradigme verrouillent ou pervertissent petit à petit chaque option de changement possible.

Et ne tombons pas dans le piège de la querelle : nous quereller ne fait qu’entretenir le chaos ou, dans le meilleur des cas, maintenir le statu quo (pendant que l’horloge continue de tourner…).

Plus une personne pense qu’elle a à perdre, plus sa résistance sera forte. Nous ne réussirons rien de pérenne et d’équilibré si nous ne prenons pas soin d’inclure ceux qui aujourd’hui profitent à fond d’un système qui arrive en bout de course.

L’inverse est vrai : nous réussirons un modèle de société pérenne et équilibré si nous prenons soin d’inclure ceux qui souffrent directement de ce système qui arrive en bout de course.

Ils nous traitent comme du bétail, ou comme de simples variables d’ajustement perdues entre les cellules C4 et Y260 d’une feuille de calcul ?

Soyons plus futés, plus humains qu’eux : traitons-les en humains. Allons à la rencontre de ces hommes et de ces femmes shootés au pouvoir. Sortons du tête-à-tête et proposons un cœur-à-cœur.

De notre côté, n’oublions pas nos objectifs. Arrêtons de prêter attention à chaque chiffon rouge qui s’agite devant notre nez. Continuons à créer des ponts entre des projets qui mettent le lien social et le respect du vivant au centre de leur modèle.

Mettons l’accent sur ce qui nous relie et, si Umberco Eco disait que « chercher un ennemi est une tendance universelle », Nelson Mandela avait compris par l’expérience que : « Pour faire la paix avec un ennemi, on doit travailler avec cet ennemi, et cet ennemi devient votre associé. »

Plus que jamais ayons conscience que nous sommes tous, à notre niveau, porteurs de solutions.

 

 

Il n’y aura pas de commémoration pour ce 13 janvier 1996…

1024px-Chemin_jardin_botanique_ThaborSamedi 13 janvier 1996 – Rennes – Parc du Thabor

Deux jeunes personnes de 24 et 27 ans marchent sur le chemin, se posent sur un banc.

Nous ne savions pas ce jour-là en nous disant « oui, faisons un bout de chemin ensemble » ce qui nous attendait.

Une seule chose nous rapprochait : des amis communs, souvenirs de nos années chez les Guides et les Scouts de France. Au delà de ça…

L’une préparait ses concours de la fonction publique, l’autre était gérant d’une petite sarl au bord du dépôt de bilan.

L’une s’imaginait un jour rejoindre Strasbourg ou Bruxelles pour œuvrer au projet d’une Europe unie. L’autre n’avait guère de conscience politique et trouvait le libéralisme plutôt cool.

L’une s’imaginait passer sa vie avec un homme sportif et bien bâti, l’autre s’imaginait une vie sans enfants et sans trop d’attaches.

Partant de là,  « ce bout de chemin » aurait tout à fait pu se terminer au bout de quelques semaines, de quelques mois. Personne n’y aurait rien trouvé à redire.

Comment imaginer alors que 20 ans plus tard, nous serions toujours là, plus amoureux qu’à ce premier jour, à prendre soin l’un de l’autre tout en cultivant soigneusement nos propres projets ?

Ne pas faire de plan,
la vie est riche de surprises

Thabor, installation de l'eau, Rennes. Installation de l'eau au Jardin des plantes (pose des canalisations en fonte, la construction des acqueducs en maçonnerie, de la cascade et de la rivière anglaise). 	 	 1884 	 127,2x84 	 BLIN

Commencer par se dire « oui, faisons un bout de chemin ensemble », sans y mettre plus de projet que cela, nous a sans doute permis d’accueillir la vie telle qu’elle s’est présentée à nous.

Et puis, petit à petit, nous avons établi nos « règles du jeu », comprendre ce qui était important, non-négociable ou au contraire tout à fait secondaire.

Une chose est certaine : nous ne sommes plus ces jeunes gens qui se promenaient en cette fin de matinée du 13 janvier au parc du Thabor. Nous sommes le fruit de cette rencontre et de nos échanges.

Un jour peut-être écrirons-nous ces 4, 6 ou 10 points qui nous semblent clés pour une vie à deux amoureuse et durable.

En attendant, nous souhaitons à tous les jeunes couples qui se forment ici et là autant de bonheur que nous en avons eu jusqu’ici.

Nous n’avons pas vu passer ces 20 ans et sommes heureux de nous dire que les plus belles années sont encore à venir !

 

 

Politique fiction…

Il y a quelques temps un scénario est né dans mon esprit biscornu…

2002 – Au lendemain du 21 avril, quelques esprits brillants comprennent l’intérêt que pourrait avoir le Front National dans les années à venir.

– Il est évident que tous les signaux sociaux, économiques, environnementaux sont au rouge : avec l’inertie et quelques rustines, le navire France continuera à voguer une quinzaine d’années. Mais ensuite, il sera trop tard pour redresser la barre.

– Oui, il faut préparer les Français à se serrer la ceinture, à traverser une zone de turbulences importantes qui mettra à mal le pays pour de longues années.

– Celui ou celle qui sera à la barre à ce moment devra prendre des mesures impopulaires, et personne n’a envie de s’y coller.

– Et si nous refilions la patate chaude au FN ?

– Excellent ! Comme disait l’autre « Plus c’est gros, plus ça passe », allons-y à fond alors : accumulons les conneries, préparons le terrain et refilons le bébé au FN. Ils seront tellement fous d’accéder au pouvoir, de toucher le saint Graal, qu’ils n’y verront que du feu.

– En 1 ou 2 mandats, ils auront fait le plus gros du travail. Nous n’aurons plus qu’à ramasser les miettes : le pays sera tellement exsangue, qu’il nous suffira d’arriver en sauveurs et nous serons élus avec des scores dignes d’une république bananière !
Entre temps, nous aurons pris soin de mettre nos actifs au chaud, histoire de tenir 5 ou 10 ans de vache maigre.

Bien entendu, tout ceci n’est que fiction et tout similitude avec des faits ou des personnages existants ne serait que le pur fruit du hasard.